LE FILS De Florian Zeller
Fils d’un couple de divorcés, Nicolas, 17 ans, est en pleine dérive. Sa mère, dépassée par la situation, demande l’intervention du père, remarié depuis peu et père d’un nouveau-né. Pour ses parents, Nicolas souffre simplement d’une crise de l’adolescence, un mal auquel nul n’échappe.

Jouant sur la culpabilité du père d’avoir quitté le domicile familial, l’adolescent lui reproche son manque de présence dans son enfance. Quitter sa mère c’était aussi le quitter, lui. Prenant une attitude victimaire, il sait habilement utiliser cette culpabilité dans ses mensonges et sa manipulation. Face aux reproches, il s’engage dans des promesses qu’il sait déjà qu’il ne tiendra pas, entre sa force d’inertie et ses silences culpabilisants. Venant habiter chez son père, une nouvelle relation s’instaure entre eux qui laisse supposer que la situation de crise est passée. Mais l’amour ne suffit pas. On peut aimer et mal faire. Le choix que fera le père sera lourd de conséquences. Pour lui, la séparation des parents est prise comme raison des souffrances de Nicolas, alors que son mal, plus structurel, relève de la psychiatrie. Pris dans leur culpabilité, les parents se sentent responsables et se démènent à leur manière pour combler aujourd’hui leurs défaillances d’hier. Quand le psychiatre parle de maladie mentale, ils nient que cela puisse concerner leur fils. Le père refuse la réalité, ce que prouve une surprenante scène finale où il rêve d’un autre déroulement des faits. Florian Zeller a un talent particulier pour l’écriture de ses pièces. Elles ont ainsi une audience internationale. Par petites touches qui semblent anodines, il raconte au public combien la situation devient de plus en plus oppressante dans cette famille, révélant ce qui se passe souvent dans la vraie vie. La pièce est centrée sur la relation entre le père et le fils. Parfait dans le rôle le plus complexe, Rod Paradot avait déjà obtenu en 2016 le César du Meilleur Espoir masculin pour son interprétation dans La tête haute d’Emmanuelle Bercot. Pour ce premier rôle au théâtre, il a reçu un Molière bien mérité, tant il excelle dans son personnage à fleur de peau d’adolescent tourmenté. C’est lui, le fils qui a perdu goût à la vie qui exprime le besoin de renouer un lien parental perdu.

Stéphane Freiss, juste et sobre, se veut père modèle, car lui-même a souffert d’un père absent. Il veut être le contraire et c’est ce qui provoque l’irrémédiable. Florence Darel dans le rôle de la mère et Elodie Navarre dans celui de la nouvelle épouse complètent parfaitement la distribution. Avec une complicité entre eux, c’est la quatrième pièce de Florian Zeller que Ladislas Chollat met en scène (après Le Père, Une heure de tranquillité et Avant de s’envoler). Modulable pour changer de cadre (tantôt chez la mère, tantôt chez le père), le décor est simple : Très blanc, il donne déjà l’idée de l’hôpital psychiatrique. Très applaudi, Le Fils obtient un succès très mérité !
Caroline Boudet-Lefort